Du haut de ses 20 ans, l'Anglais Jon Pritchard, encensé par la prêtresse de l'électronique Mary Anne Hobbs, sort
Limerence, album de hip hop largement marqué par l'IDM.
Première production impressionnante,
Limerence est le fruit de nombreux collages, ingénieusement juxtaposés. S'inspirant de disco ou de soul sur certains titres, son auteur construit un hip-hop tourbillonnant et résolument moderne. Les compositions sont vives, pleines d'énergie. Prenant le meilleur d'un
J.Dilla et le malaxant façon
Flying Lotus (écoutez
Suchbeats (feat. Stainless Steele)), Pritchard semble s'amuser à nous étourdir.
Fait remarquable avec cet album, il ravira autant les amateurs d'électronica que de hip-hop expérimental, touchant dès lors un large public y compris les néophytes. Cela s'explique par la présence de titres imparables. En premier lieu
Sacré Cool et son beat enlevé, morceau à l'énergie disco qui apporte une joie instantanée. On peut y entendre le chant chamanique de
Skip James, balancé sous forme d'échos magiques. C'est chouette de sampler
Devil Got My Woman.
Bad.day ne démérite pas non plus. Rythmé par le handclap et les cuivres taillés finement en première partie, le morceau intègre une certaine acidité, nous enfonce progressivement dans cette journée de merde où tout part en couille, ce genre de journée qui vous fait grincer des dents et progressivement perdre la tête.
Et puis il y a
Connct, dernier titre de la galette pour le moins tapageur. Ses grésillements annoncent un gros beat de clubber pour muter vers un rythme plus organique, mélodique et entraînant. Le genre de morceau que pourrait produire
µ-ziq s'acoquinant avec
Clark en utilisant les textures de
Tokimonsta.
Sachez simplement qu'à travers cette large palette sonore, l'Anglais construit des rythmes se breakant les uns les autres. Il crée un chaos luxuriant, souvent virevoltant et chaleureux malgré sa complexité (
Mynnd,
Repetition), à l'image de l'artwork, conçu par le talentueux S.Maharba, où les lignes colorées du corps s'entrecroisent pour former un tout cohérent.
Le beatmaker puise sa force de son éclectisme, recyclant tout ce qui lui passe sous la main et le bidouillant de manière ludique. Daddy Kev a bien compris le potentiel de ce jeune Anglais en produisant
Limerence.
Alpha Pup nous offre un bel album, plein de fraîcheur et de bizarrerie, en provenance de L.A.
Chroniqué par
StellaDominique
le 12/06/2011