Production boulimique pour
Tarentel ces derniers mois. Après un album sorti à l’automne 2004 (
We move through weather) et alors qu’un nouvel EP sur le label Acuarela est annoncé (
Ghost Weight), le groupe a publié simultanément ce printemps 2 EP, esquissant chacun une facette de leur univers – en
noir et blanc, comme l’annonce leurs titres respectifs – mettant en évidence les diverses directions prises par leur musique. Ces deux opus contribuent aussi à définir tout à fait l’identité de ce groupe encore méconnu de la scène post-rock, malgré plusieurs années d’activité et une discographie convaincante, les imposant comme l’une des formations les plus stimulantes et intrigantes du genre.
Face blanche avec
Paper White. Ce EP qui se compose de quatre morceaux semble fonctionner dans la directe continuité de
We move through weather. La section rythmique y est omniprésente, martelant des boucles répétitives et élaborées. La texture des morceaux, quant à elle, passe de plages abstraites à des territoires plus instables et inquiétants, hérités de ce qui apparaît comme une nouvelle manière de composer, accordant une place plus grande aux hasards et à l’improvisation.
Le premier morceau,
Isalais straight, démarre au rythme déchaîné des percussions. Puis celles-ci disparaissent, pour une seconde partie partagée entre piano et nappes sonores, dans une ambiance éthérée dont le groupe a le secret, pour se terminer de manière abrupte, comme un atterrissage forcé. Retour au pouvoir des guitares lancinantes avec
Open letter to hummingbirds, relevées de quelques accords de piano et d’une batterie discrète, pour le morceau le plus proche des premiers travaux du groupe, rappelant certains titres d’
Ephemera et de
The order of things. Le titre suivant,
Golden state overnight laisse à nouveau la place à une rythmique étouffante, dictant le ton aux guitares, pour donner naissance à une ambiance plus froide et sombre, qui n’est pas sans rappeler le premier album de
Tortoise. Enfin, la dernière piste éponyme présente le dialogue étrange entre une formation acoustique – guitare, piano, violon et clarinette – et une batterie martiale, qui aboutit à une musique comme schizophrène, hésitant entre le cœur et les jambes.
Un peu moins de 25 minutes au final, durant lesquelles
Tarentel aura présenté comme une démonstration de son savoir-faire et de ses aspirations, sans jamais tomber dans la formule ou l’artifice. La musique du groupe oscille constamment entre rock érudit et organique, proposant des compositions tout à fait émancipées des effets et artifices que s’évertuent à répéter certains groupes de la mouvance post-rock. Mais plus encore que de mettre en évidence ses qualités musicales, ce EP permet de dégager un peu mieux l’originalité de
Tarentel : leur musique ne se repose ni sur la formule, ni sur l’imitation, mais cherche constamment à se confronter à de nouveaux défis, à coloniser de nouveaux espaces.
Chroniqué par
Christophe
le 01/07/2005